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L’acte3 de la décentralisation au Sénégal, un autre faux départ ?


Rédigé le 11 Octobre 2019 à 18:04 | 0 commentaire(s) modifié le 14 Octobre 2019 - 18:47


(Equonet-Dakar) - L’acte3 de la décentralisation présentement en évaluation pourrait constituer un tournant dans la marche du Sénégal. La réforme a, en effet, su secouer les élus locaux le plus souvent plongés dans une torpeur. Ainsi, remobilisés les troupes tendent vers une appropriation-territorialisation des politiques publiques avec le souci d’optimiser la contribution locale. Une vraie car mature décentralisation se pointe à l’horizon. Toutefois, la lettre motivée a lors de son application suscité de nombreuses imperfections, incohérences et insuffisances, particulièrement, dans notre département de Diourbel. Ces griefs contre l’acte3 méritent qu’on s’y arrête pour augurer d’un développement territorial maitrisé et d’une cohésion sociale, un enracinement avant ouverture vers les grands ensembles éco géographique et l’union africaine escomptés.


       Expression d’une démocratie territoriale représentative, la décentralisation fait de la base le premier échelon de décision au niveau local. Elle est une recherche permanente de l’autogestion, d’une gouvernance endogène des ‘’affaires locales’’ et a été présente dans la démarche et marche de l’Etat sénégalais dés les indépendances. A travers des dates repères comme 1972 avec l’érection de la communauté rurale, 1996 avec la régionalisation et l’acte3, voté en procédure d’urgence, par l’Assemblée nationale, le 28 décembre 2013. La décentralisation sénégalaise a exprimé constamment une volonté ou vision éclairée des différents pouvoirs. En effet, à ses débuts, motivée par la nécessité de distinguer nettement les statuts des différentes collectivités pour les besoins d’une administration paramétrée du territoire nouvellement indépendant, elle s’est raffermie en 1996 avec l’option d’une meilleure et plus précise prise administrative et technique sur l’étendu de la nation alors trentenaire et l’acte3 venu à la cinquantaine de nos indépendances, âge de vérification pour confirmation ou correction donc de maturation de nos orientations constitue une prise en compte du bilan de la décentralisation sénégalaise mais une redirection.

      En effet, en 2012, le nouveau locataire du palais de la république a trouvé le Sénégal trainant des disparités territoriales prononcées à corriger, une quasi incapacité des collectivités locales surtout rurales à assumer les compétences transférées, une macrocéphalie de la Capitale Dakar (par le peuplement mais la dotation infrastructurelle et la présence administrative), une faible intégration féconde des territoires…et donc des élus locaux plongés dans la torpeur. Ainsi, par une position ambitieuse et pour mettre un terme à la psychose de deux ou plusieurs catégories de citoyens en harmonie avec les directives de la CEDEAO, il fut décrété la communalisation intégrale. Des programmes d’urgence (PUDC, PUMA, PROMMOVILLE, PRODAC…) furent lancés pour venir en appui à l’aménagement local tout en cherchant à booster les fonds locaux comme les fonds de dotation de la décentralisation (FDD), le budget consolidé d’investissement (BCI), le fonds d’équipement des collectivités locales (FECL), la contribution locale, aussi pour des besoins en ressources humaines l’annonce d’une fonction publique locale... Des aménagements toujours en cours furent entrepris notamment à Diamniadio pour décongestionner la capitale. Une revivification des zones éco-géographiques, grands ensembles territoriaux est prévue et cette dernière projection, quoique,  source de mésententes et mécontentements aiguisés n’en est pas moins salutaire car devant permettre une territorialisation paramétrée, adaptée et intégrée des politiques publiques par des entités territoriales spécialisées selon leurs potentialités physiques et patrimoniales, notamment, comme c’est le cas de la première puissance mondiale, les Etats unis d’Amérique. Ces grands ensembles spécialisés avec des politiques et pratiques agricoles adaptées, des unités industrielles et établissements universitaires intégrés, une intercommunalité effective…devront savoir relever les défis d’une citoyenneté locale affirmée et alerte, de développement partagé grâce, notamment, à leur mise en relation, une dialogue féconde des territoires qui vont ainsi viser le marché continental à l’heure de la zone de libre échange continentale (ZLECA).
 
    Toutefois, au Sénégal, comme on a l’habitude de le dire, les textes sont presque parfaits mais font l’objet d’applications calamiteuses : « une avancée sur la papier n’en est pas forcément une dans la pratique». Ainsi, après la décentralisation «transfert des 9 compétences» déclarée par la plupart de ses exécutants vide de moyens des ambitions et missions assignées des régimes Diouf et Wade. La seconde alternance sénégalaise a propulsé au sommet le régime Sall qui par son plan référent le PSE et ses divers outils de mise en œuvre comme le PUDC, le PRODAC, l’ANIDA…viserait un changement substantiel. Néanmoins, certains critiques voient en l’acte3 : une autre remue ménage, un jeu de chaises, une simple requalification prétextant une rectification des disparités et des carences de nos collectivités rurales. Aussi, la cohabitation des pouvoirs des collectivités liées voire insérées implique un partage, un arbitrage, et une correcte représentation des différentes collectivités départementales dans le conseil départemental (Dr Djibril Diop, 2016). Et là, s’il ne s’agira pas de porter atteinte à l’équité territoriale, il va de soi que le président du conseil départemental doit avoir une certaine primauté naturelle car devant être le coordonnateur de ‘’l’exécutif départemental local’’. Dans cette distinction, délimitation des pouvoirs et prérogatives, le rôle du pouvoir étatique, du centre mériterait d’être clairement établi. Sur quoi ou où? S’exerce sa prééminence, sa primauté pour des besoins, notamment, de souveraineté-sécurité-symbiose nationales. Cela parce qu’à la concurrence, au désaccord sur les priorités locales faisait suite une régionalisation sans substance; où on avait droit à une confrontation de logiques, de plans, voire de volontés hors de toutes capacitations à l’ouvrage, que celles-ci soient financières, techniques, de leadership, ou même de conviction d’où l’aménagement et l’intercommunalité en pâtissaient. En effet, aussi bien le dirigisme du centre que le fractionnisme du local sont préjudiciables, l’heure devrait être à une convergence au juste milieu : le plan pour le plan abandonné, le territorialisme partisan tendre au territorialisme équitable et paramétré selon les priorités et possibilités locales et nationales. Ce dernier point qu’est le frottement, dévoiement et abus des pouvoirs exige un arbitrage, l’érection de voies de recours rapides pour l’effectivité de la décentralisation. Aujourd’hui encore, le leadership local est souvent piétiné, dessaisi de ses prérogatives selon les ardeurs du centre, des exemples d’un tel fait fusent de partout et à Diourbel aussi certaines autorités locales en font mention dénonçant des aménagements sans même les aviser. La communalisation intégrale est un vœu car dans la réalité, il est toujours flagrant un dénuement dans beaucoup de nos collectivités locales érigées en communes d’où à certains égards l’acte3 à tout l’air d’un remue ménage, d’un autre faux départ du fait des moyens qui n’ont pas suivi les compétences transférés pourtant de nouvelles compétences seront transférées dans les domaines de l’agriculture, de la pêche, de l’élevage, du tourisme, de l’hydraulique et de l’assainissement. Dans ce registre, une autorité locale diourbelloise avance même qu’ils ont été amputés des fonds du budget consolidé d’investissement (BCI) pour habiller le PUDC….La liste des invites à révision n’est pas exhaustive d’autant plus que l’acte3 est à mi-parcours .

      En somme des motifs de satisfaction ont été notés, notamment, avec l’appui à l’aménagement local par le centre à travers des programmes tels : le PUDC, le PUMA, PROMMOVILLE, initiatives qui gagneraient à être plus participatives, concertées. Aussi, en 2014, à Diourbel a été notée une augmentation significative des fonds de dotation. Les découvertes minières sont un motif d’espoir et les territoires abritant ses mines devraient s’en ressentir, connaitre un impact visible, notamment par les taxes; mais aussi pour des besoins de conciliation-compensation toutes nos collectivités devront bénéficier des retombées. Le budget participatif évalué gagnerait à être généralisé, ainsi sera su ce que peut local et l’appui étatique défini pour plus de transparence. Faisant souvent avec une bureaucratie politicienne, nos collectivités devraient tendre à l’équilibrer avec, notamment, la fonction publique locale et une capacité à mobiliser les services déconcentrés. L’expropriation pour utilité publique se voit souvent opposer un refus de la part des populations dans nos collectivités (construction d’établissements scolaires, exemple de la commune de Ngohé où les autorités locales ont du édifier de tels établissements dans des bas fonds) d’où l’Etat devrait se porter garant. Dans son affermissement, l’acte3 pourrait instaurer un fonds de  solidarité local dans une logique conciliante et secouriste. D’ailleurs le ministre de la décentralisation Mr Oumar Guéye avance qu’ «avec la contribution économique locale (Cel) qui est une révolution pour les collectivités territoriales, toutes les collectivités territoriales vont avoir des ressources issues de la valeur ajoutée des infrastructures au niveau national.» Les autorités locales pour être en phase avec l’acte3 sont appelés à appuyer la formulation de projets de territoires et susciter l’entreprenariat local…. Ainsi, à mi-parcours, l’acte3 a conforté le territoire comme un enjeu de développement d’où une invite à l’intelligence territoriale. Appel bien perçu par certains praticiens du territoire qui se sont organisés en volontaires.
 
 Moussa Kanté , géographe-chercheur à l’école doctorale
des sciences de l’homme et de la société(EDSHS), UGB
 
 
 
 
 
Moussa Kanté, géographe-chercheur



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