titres miniers et pétroliers : moins d’engouement, manquements et anomalies sur les opérations d’octroi, de renouvellement et de transfert


Rédigé le 31 Janvier 2024 à 07:00 | 0 commentaire(s) modifié le 1 Février 2024 14:44

Ndakhté M. GAYE est un journaliste d'investigation engagé dans le suivi citoyen des obligations… En savoir plus sur cet auteur

(Equonet Energies-Dakar) – En plus des manquements et anomalies constatés, il y a moins d’intérêt sur les octrois, renouvellements et transferts de titres minier et pétrolier.


L’année 2022 n’a pas connu d’enthousiasme dans l’octroi, le renouvellement et le transfert de titres et autorisations miniers et d’hydrocarbures. C’est le constat qui se dégage, sur ce chapitre, dans le rapport ITIE 2022.

D’abord sur les titres et autorisations miniers, le rapport note une forte baisse des octrois durant cette période comparativement à l’année précédente. En effet, selon les registres des permis miniers communiqués par la direction de la géologie et des mines (DGM) à l’administrateur indépendant (AI) du rapport ITIE 2022, 17 titres miniers et autorisations ont été octroyés en 2022 contre 93 titres l’année précédente.

Dans le détail, il s’agit de dix autorisations d'exploitation de carrières privées temporaires (AECPT), trois autorisations de prospection (AP), deux autorisations d’exploitation semi-mécanisée (AEMSM), un permis de recherche (PR) et une autorisation d’exploitation de petite mine (AEPM).

Selon les données communiquées au CN-ITIE par la DGM, le Sénégal comptait 658 titres miniers et de carrières au 31 décembre 2022.

Au sujet des renouvellements opérés en 2022, il est souligné dans le rapport ITIE qu’ils ne peuvent pas être consultés dans le registre des titres miniers communiqué par la DGM.

Sur ce point, l’AI fait remarquer certains constats à la suite de l’examen du registre des titres miniers au 31/12/2022 fourni par la DGM dans le cadre de l’élaboration du rapport ITIE.

En effet, selon lui, le registre montre que :
- La date de la demande peut être la même ou postérieure à la date d'octroi ;
- Des titres avec une date de validité antérieure au 31/12/2022, figurent toujours dans le registre arrêté au 31/12/2022 avec le statut actif ;
- Les dates de renouvellement des titres ne peuvent pas être consultées - Les informations sur les opérations de transferts ne peuvent pas être consultées. Un état séparé des transfert opérés en 2022 a été communiqué.

La DGM a expliqué à l’AI que les dossiers des titres objet de ces constats seront examinés en détail et le registre sera mis à jour en conséquence.

Dans la même foulée, il a fait état d’une certaine obscurité sur le dossier SGO et Massawa.
« De plus, les états financiers de SGO arrêtés au 31/12/2022 mentionnent qu’à la date du 25 novembre 2022, l’opération de fusion-absorption entre SGO et Massawa a été bouclée par la dissolution et la radiation de la société Massawa SA. Toutefois, la société Massawa SA figure toujours au niveau du registre arrêté au 31/12/2022 comme détenant le PE (Code 2296). Selon la DGM, le statut de Massawa SA est toujours actif sur le cadastre du fait que le décret portant fusion/absorption de son permis d’exploitation par la société ENDEAVOUR/Sabodala Gold Operations SA sur sa concession minière n'est pas encore signé. Le registre sera mis à jour dès la signature dudit décret », a-t-il fait savoir.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces constats font ressortir des manquements et anomalies et, du coup, posent un problème de transparence dans ces opérations.
A cet égard, il y a lieu de souligner que les processus d’octroi, de transfert et de renouvellement des licences et des contrats correspondent à l’Exigence 2.2 de la Norme ITIE (2019). Celle-ci met l’accent sur la clarification des informations sur les processus d’octroi, de transfert et de renouvellement des licences et des contrats.

Au sujet des transferts de titres miniers, la même source signale à l’AI qu’il y en a eu dix qui ont été opéré en 2022.

Quant aux titres pétroliers, il n’y a aucune opération de nouvel octroi durant la période 2021-2022, note l’AI citant la direction des hydrocarbures (DH).

En outre, s’agissant de l’appel d’offres (AO) lancé en 2019 par la société nationale des pétroles du Sénégal (PETROSEN), la DH a informé à l’AI que seule une compagnie a répondu à cette ouverture en 2022 et qu’il n’y a pas encore eu d’attribution.

A cet égard, l’AI a rappelé qu’en octobre 2019, PETROSEN a ouvert un AO international portant sur douze (12) blocs pétroliers libres, situés dans la partie maritime profonde du bassin.

« Suite à la phase de promotion, un appel à manifestation d’intérêt a été lancé. Les sociétés ont été invitées à soumettre des propositions techniques et financières au plus tard le 31 juillet 2020. Ce délai a été reporté à la date du 15 décembre 2020 en raison de la pandémie de Covid-19 d’une part, et de la chute des prix du pétrole d’autre part », a-t-il souligné.
« Toutefois, à la date de publication du rapport ITIE 2022, la DH et PETROSEN ont confirmé que le licencing round a été suspendu du fait du peu de manifestations d'intérêts », a-t-il fait savoir.

La même source fait aussi état d’un renouvellement opéré en 2022. « En 2022, une nouvelle prorogation a été confirmée par l’Etat sénégalais par décret du 28 février 2022 au 28 février 2024 soit un renouvellement de deux ans pour l'évaluation de la zone SNE Nord-Spica par Woodside. Cela fait suite au transfert opéré en 2021 concernant tous les droits, obligations et intérêts détenus par FAR Sénégal RSSD SA, résultant du contrat de Recherche et de Partage de Production d’Hydrocarbures et de l’Accord de l’Association relatifs aux blocs Rufisque Offshore, Sangomar Offshore et Sangomar Deep Offshore, à la société Woodside Energy Sénégal B.V. », a-t-elle noté dans le rapport.

Pour les transferts des titres pétroliers, elle déclare qu’il n’y en a pas eu en 2022.

De tout ce qui précède, l’on peut constater un manque d’engouement sur les titres et autorisations miniers et pétroliers. Ce qui suscite certaines interrogations.
Qu’est-ce qui peut expliquer ce manque de manifestation d’intérêt ? Est-ce à cause des procédures (justifications de capacités techniques et financières) ? Est-ce à cause du coût des paiements de droits d’entrée (entre cinquante mille et deux millions cinq cent mille) ?

Ces questions ne souffrent pas de pertinence car, du côté de la DGM, on signale un projet de révision du manuel des procédures d’octroi qui serait en cours d’élaboration pour donner suite à la nouvelle organisation de la direction.

Ce projet devrait aider à :
- Apporter plus de précisions sur les critères techniques et financiers à retenir ;
- Définir clairement les opérations sur les titres qui sont couverts ;
- Inclure les contrôles internes à suivre pour la vérification des procédures appliquées lors de chaque opération sur les titres.

Au regard de tout ce qui précède, il s’avère important de signaler que l’octroi et la gestion des permis et des autorisations sont actuellement régies par la Loi n°2016-32 portant Code minier et son décret d’application 2017-459 ainsi que par la Loi 2012-36 portant Code général des impôts.

Et, si le décret de 2020 portant mise en œuvre du Code pétrolier de 2019 et le nouveau manuel de procédures du ministère des Mines et de la Géologie publié en 2021 ont permis de clarifier les critères réglementaires pour ces opérations sur les permis, il reste que des efforts supplémentaires méritent encore d’être faits sur la mise en œuvre de l’étude sur l’application du cadre légal et réglementaire régissant les opérations d'octroi, de renouvellement et de transfert des permis miniers et pétroliers intervenues en 2021 et 2022.

Sur cette question, l’AI signale que l’ITIE Sénégal envisageait de lancer, en 2023, une étude sur la vérification de l’application du cadre légal et réglementaire applicable régissant les opérations d'octroi, de transfert et de renouvellement de titres intervenues en 2021 et 2022. Et qu’actuellement, le processus de sélection du consultant qui sera chargé de ladite mission est en cours.

Aussi, pour se conformer à l’Exigence 2.2 de la Norme ITIE (2019), a-t-il invité le Comité national ITIE à accélérer la mise en œuvre de ladite étude. Laquelle devrait faire un état des lieux du cadre légal et réglementaire et des procédures applicables, identifier les pratiques réelles et relever les écarts significatifs et enfin, évaluer l’efficacité et l’efficience des nouvelles procédures prévues par le manuel 2021 de la DGM.

Il lance le même appel en direction de la DGM. « En préparation au projet en cours de la DGM pour la mise en place des données sur le registre des droits miniers sous format de données ouvertes dans le but d’atteindre les objectifs ultimes de la transparence et de l’accessibilité du public à ces données, nous invitons la DGM à examiner et expliquer les manquements et anomalies relevés au niveau du registre minier manuel et s’assurer que toutes les opérations effectuées sur les titres miniers y sont reflétées », a-t-il recommandé.

Ce qui pourrait contribuer à améliorer la transparence dans ce domaine où, malgré tout, le Sénégal a quand même accompli des progrès significatifs en matière de clarification des informations sur les processus d’octroi, de transfert et de renouvellement des licences et des contrats.

Ce qui est déjà bien. Mais il faut toujours améliorer.


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