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l’application pour smartphone qui aide les fidjiens à acquérir de saines habitudes alimentaires


Rédigé le 6 Mai 2022 à 17:59 | 0 commentaire(s) modifié le 8 Mai 2022 - 15:10


(Equonet-Dakar) - L’innovation dans les petits États insulaires en développement combine le savoir-faire numérique et les approches traditionnelles.


Irene Chief décrit sans détours ce qui l’a poussée, avec sa collègue Ateca Kama, à se mobiliser pour lutter contre les mauvais régimes alimentaires dans leur pays insulaire, les Fidji. La vue de collègues de travail trentenaires ou quadragénaires mourant de crise cardiaque «est véritablement traumatisante», explique-t-elle. «Nous suivons les enterrements de plus en plus nombreux de personnes décédées jeunes... quand certains quittent ce monde à l’âge de 30 ou 40 ans, il est temps de se pencher sur nos régimes alimentaires.» 
 
La profonde inquiétude que suscitent les maladies non transmissibles liées à l’alimentation a conduit Irene, qui travaille à l’Université du Pacifique Sud, et Ateca, qui est haute fonctionnaire au Ministère fidjien de la santé, à commencer à collaborer à la mise au point de l’application pour smartphone My Kana. Cette application aide les Fidjiens à surveiller ce qu’ils mangent et leur donne des conseils sur l’aménagement de potagers.  
 
My Kana (qui signifie «aliments» dans la langue autochtone iTaukei de Fidji) était l’une des innovations présentées au Forum des solutions pour les PEID, organisé conjointement par la FAO et le gouvernement de Fidji en août 2021.  
 
Le problème pour lequel cette application a été conçue n’est pas particulier à Fidji. En vérité, de nombreux pays du monde, parmi lesquels les PEID sont fortement représentés, sont confrontés à un «triple fardeau de la malnutrition» — insuffisance pondérale, excès pondéral et obésité, qui s’accompagnent de carences en micronutriments.  
 
Les modes de vie contemporains modifient les habitudes alimentaires traditionnelles des Fidjiens, qui passent de la consommation de racines de production locale à un régime plus dense en céréales et de la consommation de fruits et légumes du terroir à une consommation excessive d’aliments transformés, sucrés ou salés, chargés en graisses et souvent importés.  
 
Cette évolution est particulièrement marquée chez les Fidjiens vivant en zone urbaine, dont le régime alimentaire et le mode de vie ont radicalement changé par rapport à ceux de la génération de leurs parents ou grands-parents.  
 
«Notre population consomme également beaucoup plus de kilocalories, et avec une activité physique insuffisante, cela contribue à l’incidence de maladies non transmissibles», explique Ateca. Selon le Ministère fidjien de la santé, environ 80 pour cent des décès survenant dans le pays sont imputables à des maladies non transmissibles et ces chiffres sont en augmentation. 
 
Quelle est donc la portée de cette innovation, présente sur les smartphones de milliers de Fidjiens?  
Irene nous l’explique: «Il ne faut pas oublier que Fidji compte 300 îles, alors comment faire pour que chacun ait accès aux informations?»  
 
La vie sur ces îles, différente de l’image de décontraction dans un cadre idyllique du Pacifique Sud que diffusent romans et brochures touristiques, est hérissée de nombreuses difficultés, tient à rappeler Irene. Les traversées en bateau d’une île à l’autre prennent du temps et les voyages en avion sont coûteux, «mais la société fidjienne connaît une évolution rapide», explique Irene.  
 
La déréglementation croissante d’internet «nous permet d’utiliser les téléphones portables et c’est ainsi que nous avons mis au point cette application. En recourant à l’innovation, les Fidjiens ont toujours essayé de trouver à s’adapter et de "faire avec les moyens du bord", surtout lorsqu’on n’a pas beaucoup d’argent à disposition. C’est pourquoi nous proposons aussi cette application gratuitement, ce qui est inhabituel», ajoute Irene.  
 
Privilégier les aliments du Pacifique 
 
Un autre aspect innovant de cette application est qu’elle s’appuie sur des aliments disponibles au plan local, tirés de l’actuelle table de composition des aliments des îles du Pacifique, élaborée conjointement par la FAO et l’Université du Pacifique Sud. Bien qu’elle date de 2004, cette table est toujours considérée comme un guide nutritionnel faisant autorité par les experts de la région et on l’utilise largement pour calculer les apports nutritionnels, planifier des programmes d’amélioration de la nutrition et élaborer des régimes spéciaux à l’intention de personnes souffrant de maladies diverses. Mais elle n’est pas disponible sous une forme aussi pratique.  
 
Irene précise: «Cette application contient également tous les aliments des Fidji et tous les aliments transformés. Elle donne ainsi tous les différents nutriments de leur composition. Une fois un aliment et sa quantité entrés dans l’application, par exemple un morceau de poulet... celle-ci calcule sa teneur en calories, en protéines et en vitamines.»  
 
Par ailleurs, la fonction jardinage de l’application incite les utilisateurs à cultiver leurs denrées alimentaires. «Cette fonction explique comment entreprendre l’aménagement de son potager et fournit aussi des informations sur les pesticides et les engrais domestiques», explique Mme Alvina Deo du Centre national de l’alimentation et de la nutrition de Fidji, qui présentait l’application au Forum de l’innovation des PEID.  
«C’est un ensemble complet de fonctions sur l’alimentation saine, qui va de la culture des denrées aux mets consommés chez soi. Personne ne peut donc plus avancer l’excuse de ne pas avoir de jardin ou de ne pas pouvoir aménager des semis chez soi, car l’application propose des solutions à ces situations», ajoute Alvina.  

«C’est là l’innovation proprement dite: nous mobilisons les ressources dont nous disposons afin de pouvoir essayer de mesurer des apports nutritionnels et de les proposer à notre population», déclare Irene. Ateca ajoute, «l’innovation consiste aussi en partie à accroître ou à améliorer progressivement ce que le produit originel est censé être.» 
Le projet a été conçu et mis en œuvre avant que la pandémie de covid-19 ne vienne amputer radicalement le calendrier des séances de sensibilisation organisées en présentiel par le Ministère de la santé, dont le but était de faire passer des messages sur l’alimentation et la santé, ce qui n’a fait que renforcer l’importance d’une approche numérique. 
  
Le passage au numérique constitue une tendance observée dans toute la région Asie‑Pacifique, même si la nature de l’innovation varie.  
 
L’objectif est d’étendre la couverture de l’application à une douzaine de nations insulaires du Pacifique, voire davantage, en utilisant les différentes langues nationales et en se fondant sur les aliments locaux. La FAO a déjà apporté son soutien à la production d’une version de l’application pour l’archipel voisin des Tonga.  
 
Toutefois, pour que le projet devienne réalité, il faudra trouver des sources de financement supplémentaires. En outre, déclare Ateca, «dans les nations insulaires, les réunions en face à face favorisent la confiance mutuelle et les bonnes relations de travail». S’ajoutant aux questions de financement, l’évolution de la pandémie covid-19 est donc appelée à jouer un rôle déterminant.  

Dans le prolongement du Forum de l’année dernière, un Dialogue sur les solutions pour les PEID organisé par la FAO en février 2022 a donné l’impulsion nécessaire au lancement et à la transposition à plus grande échelle d’autres idées innovantes au même titre que My Kana. Des innovations comme celles-ci sont essentielles pour transformer la production, la distribution et la consommation alimentaires, en réalisant les objectifs d’amélioration de la production, de la nutrition, de l’environnement et des moyens d’existence promus par la FAO. 

L'histoire originale et les photos associées sont disponibles sur :

equonet



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